Genk (Brussels Morning Newspaper) – Le décès du pape François a provoqué une vive émotion chez Emmanuel Henckens, originaire de Genk, survivant d’abus sexuels au sein de l’Église. Parmi quinze victimes, il avait été choisi pour un échange personnel avec le souverain pontife. « J’ai vu la douleur dans ses yeux, cela lui causait aussi beaucoup de chagrin », confie-t-il.
Rescapé d’abus commis par l’Église catholique, Emmanuel Henckens reste profondément marqué par la disparition du pape François. En septembre 2024, il avait rencontré le Saint-Père avec quatorze autres victimes pour un dialogue privé. Il s’était senti reconnu pour la première fois, un geste fort de la part du Vatican, que l’Église catholique belge n’avait jamais osé faire. Lors de cette rencontre, il a perçu dans le regard du pape une grande souffrance. La douleur persiste d’autant plus qu’une deuxième rencontre prévue avec lui a été annulée.
Emmanuel Henckens, qui a témoigné dans la série télévisée Godvergeten, a eu un entretien de deux heures avec le pape François lors de sa visite en 2024 – bien plus long que l’heure initialement prévue.
Durant cet échange, le pape s’est excusé pour son retard et a exprimé sa profonde détresse face aux scandales d’abus dans l’Église. Cette rencontre a représenté une étape cruciale pour Henckens : c’était la première fois qu’il recevait une reconnaissance sincère de son vécu.
L’attitude du pape a marqué un tournant : à l’écoute, empathique, il a tranché avec l’approche des autorités ecclésiastiques belges, qui avaient souvent accueilli les témoignages avec scepticisme.
Quel est le contexte des abus dans l’Église belge et la réaction du Vatican ?
Un rapport indépendant publié en 2010 avait révélé 497 cas d’abus sexuels d’enfants commis entre 1950 et 1990 au sein de l’Église catholique en Belgique. La publication de ces révélations avait provoqué une onde de choc dans l’opinion publique, mais les poursuites judiciaires avaient été limitées par la prescription. Une enquête plus récente en 2021 a mis au jour plus de 1 000 nouvelles accusations, renforçant la pression sur la hiérarchie ecclésiastique.
Dès son élection en 2013, le pape François a instauré des règles plus strictes concernant le signalement des abus, renforcées lors de son pontificat en 2019. Lors de son voyage en Belgique en 2024, il a volontairement rencontré des survivants – un geste extrêmement rare pour un pape dans cette région.
Cependant, les critiques persistent : pour beaucoup, l’Église tarde encore à mener des réformes concrètes. Des membres de l’Église belge dénoncent ouvertement le manque de soutien aux victimes, tandis qu’Emmanuel Henckens décrit une institution ayant nié et rejeté les survivants.
Aujourd’hui, la mort du pape François soulève des inquiétudes quant à la poursuite de ses actions : son successeur poursuivra-t-il avec la même détermination la lutte contre les abus dans l’Église ?
