Pour les partisans de la croissance économique, Donald Trump est une mauvaise nouvelle. Les États-Unis sont considérés comme le « moteur de croissance » de la planète, générant richesse et progrès technologique pendant que le reste du monde, notamment l’Europe, stagne. Nous comptons sur l’Amérique pour nous tirer vers le haut. Les droits de douane imposés par Trump et sa politique économique chaotique représentent la première menace sérieuse à la croissance américaine depuis une génération, avec des répercussions sur les perspectives de croissance de l’Europe.
Plutôt que de simplement limiter les dégâts, l’Europe devrait voir dans cette situation une opportunité. Alors que les États-Unis vacillent, le rôle de « moteur de croissance » mondial devient vacant. L’Europe pourrait se positionner pour combler ce vide. Les démocraties libérales en dehors des États-Unis devraient s’unir pour alléger la réglementation, maintenir une fiscalité simple et faible, attirer les investissements et devenir les chefs de file mondiaux de la croissance et de l’innovation. Cette semaine, des hauts responsables politiques du Royaume-Uni et de l’Union européenne se réunissent à Londres pour un sommet. C’est une occasion idéale pour établir une nouvelle coopération orientée vers la croissance.
Au niveau national, le Premier ministre britannique Sir Keir Starmer a affirmé qu’il ne « choisirait pas » entre un rapprochement économique avec les États-Unis ou avec l’Union européenne. Nombreux sont ceux qui ont une opinion tranchée sur la voie qu’il devrait privilégier. En filigrane, ce débat pose la question de savoir si Starmer doit adopter un modèle économique libéral à l’américaine ou accepter la primauté des réglementations européennes sur l’économie britannique. En réalité, il n’existe pas de tel choix exclusif. Starmer peut approfondir ses relations avec l’UE tout en plaçant la croissance au cœur de sa stratégie.
L’UE affirme vouloir la croissance, tout comme le gouvernement britannique, et se dit prête à alléger les réglementations pour y parvenir. Il est temps de mettre cette volonté à l’épreuve. Au lieu de s’enliser dans des considérations politiques, les participants au sommet devraient se concentrer sur des mesures concrètes pour réduire les obstacles au commerce et à l’entreprise. Qu’il s’agisse de technologie ou d’agriculture, les possibilités sont nombreuses pour que le Royaume-Uni et l’UE concluent des mini-accords facilitant les échanges transfrontaliers, ouvrant leurs marchés respectifs et stimulant la croissance.
Le sommet pourrait marquer une étape cruciale vers la construction d’une nouvelle Europe tournée vers la croissance. La croissance économique n’a rien de sorcier. Fondamentalement, elle nécessite que les responsables politiques sachent se retirer. Il ne s’agit pas d’idéologie, mais de régulation raisonnable. Vous voulez que la tech européenne prospère ? Il faut alléger le Digital Markets Act, le RGPD et l’AI Act. Vous souhaitez plus d’énergie ? Investissez dans le nucléaire. Vous voulez une Europe plus saine et plus sûre ? Privilégiez des politiques de santé publique efficaces, comme une fiscalité faible sur le tabac, pour éviter qu’il ne tombe entre les mains de réseaux criminels. Vous souhaitez une croissance verte ? Supprimez certaines réglementations environnementales trop lourdes comme le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (CBAM), le programme « de la ferme à la table » et le Pacte vert européen.
L’UE a déjà montré qu’elle était consciente des lacunes laissées sur les marchés mondiaux par le repli américain et qu’elle était prête à les combler. Les opportunités ne se limitent pas à la politique économique. En matière de science, par exemple, l’Europe voit une chance d’attirer les meilleurs talents américains pour renforcer sa recherche, profiter de l’incertitude outre-Atlantique et du malaise qui règne dans la communauté scientifique américaine.
« Le rôle de la science dans le monde actuel est remis en question. L’investissement dans la recherche fondamentale, libre et ouverte est remis en question. Quelle énorme erreur de jugement », a récemment déclaré la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Espérons que l’arrivée de certains des meilleurs scientifiques au monde aidera l’Europe à éviter les politiques non scientifiques basées sur des données erronées — comme l’interdiction des sachets de nicotine — et à privilégier plutôt l’innovation, une fiscalité faible, des marchés ouverts et une régulation simple.
Les gros titres des journaux après le sommet Royaume-Uni–UE mettront peut-être l’accent sur les accords en matière de défense et de sécurité, mais ce n’est que la moitié de l’histoire. L’opportunité d’une Europe pro-croissance est immense. Les responsables politiques européens doivent saisir cette chance de devenir les nouveaux leaders mondiaux de la croissance économique avant que d’autres nations moins favorables ne prennent cette place.
Alors que l’Amérique s’est enrichie ces dernières années, le reste du monde en a largement bénéficié. Si les États-Unis ne veulent plus jouer ce rôle, rien n’empêche l’Europe de le reprendre. Il n’y a pas si longtemps, la zone euro avait une économie d’une taille comparable à celle des États-Unis. Aujourd’hui, l’économie américaine est deux fois plus grande. L’Europe a un sérieux retard à rattraper. Commençons dès ce week-end.